Chaque année, les expérimentateurs du projet Syppre en limons profonds de Picardie font un bilan des résultats et enseignements, de la campagne écoulée, et en pluriannuel depuis le début de l’expérimentation.
Du fait du contexte très humide de l’été 2021, la récolte tardive des cultures a retardé le semis des couverts d’interculture et du colza. Le colza, semé fin août, présente une croissance à l’automne tout à fait satisfaisante. Les conditions climatiques, très pluvieuses dès octobre, sont favorables pour des implantations de cultures d’hiver plutôt précoces, mais compliquent les semis plus tardifs : la féverole, qui devait être semée fin novembre sur la plateforme, est finalement remplacée par un pois semé au printemps. Les implantations des cultures de printemps se réalisent dans de bonnes conditions. En revanche, le stress thermique et hydrique sur la période printanière et estivale pénalise le développement des cultures, et impacte particulièrement le rendement des cultures de printemps (maïs, pois de printemps, flageolet et dans une moindre mesure betterave et pomme de terre). A l’inverse, les cultures d’hiver – colza et surtout blé – réalisent des rendements très satisfaisants sur cette campagne, conformes aux objectifs fixés.
Le pré-buttage d’automne confirme son intérêt
La stratégie d’implantation de la pomme de terre en pré-buttage d’automne confirme encore son intérêt cette année, avec une bonne performance de la pomme de terre du système innovant, relativement au témoin. Cette technique qui s’appuie sur un décompactage en fin d’été, suivi du semis d’un couvert d’interculture puis d’un buttage semble pertinent pour à la fois concilier rendement de la pomme de terre et éviter un travail et un affinage excessif du sol au printemps. En revanche, la technique du strip-till d’été avant l’implantation de culture de printemps (betterave et maïs) ne conduit pas à des résultats concluants depuis déjà deux campagnes, elle sera donc abandonnée pour la campagne 2022 – 2023 au profit d’un décompactage en fin d’été. La gestion des adventices est globalement satisfaisante sur la plateforme, avec néanmoins une flore de dicotylédones (chénopodes en particulier) et de vivaces qui pénalise les cultures de printemps, de manière plus marquée dans le système innovant que dans le système témoin. La gestion des ravageurs est très satisfaisante, à l’exception des dégâts d’oiseaux sur pois et flageolet. La gestion des maladies est tout aussi satisfaisante, la faible pression maladie observée cette année ayant même permis de faire l’impasse en fongicide sur toutes les cultures du système innovant, à l’exception du colza.
En pluriannuel, on constate globalement une bonne maîtrise du système innovant, notamment en termes de gestion des maladies et de la nutrition azotée, et une difficulté à atteindre les rendements objectifs.
Tableau 1 : Évaluation de la maîtrise technique et agronomique pour chaque rubrique de gestion du système de culture innovant vert => satisfaisante, jaune => moyennement satisfaisante, rouge => non satisfaisante).

Un système plus performant sur les usages d’intrants et sur l’impact environnemental, mais moins productif
Les performances du système innovant sont très bonnes en termes de réduction de l’usage des intrants et des impacts environnementaux (tableau 2). A l’inverse, les résultats économiques et de productivité sont inférieurs dans le système innovant depuis le début de l’essai, en raison des très bonnes performances économiques du système témoin (surface plus importante de cultures à haute valeur ajoutée dans l’assolement témoin ; bonne maitrise technique de ces cultures), et des performances en retrait de certaines cultures du système innovant. Par ailleurs, l’arrêt du légume d’industrie à partir de la campagne 2022-2023, dont les performances sont trop variables en contexte non irrigué, devrait conduire à une amélioration des performances économiques des systèmes témoin et innovant. L’amélioration de la réussite de la betterave sans labour dans le système innovant devrait contribuer à réduire les écarts de marge entre les deux systèmes.
Tableau 2 : Performances du système de culture innovant (et variation par rapport à l’objectif).

Des enseignements utiles pour s’engager dans la transition agroécologique
Que les résultats soient positifs ou négatifs, ces 6 premières années d’expérimentation du système innovant ont permis de générer des enseignements utiles à tous ceux qui souhaitent s’engager dans la transition agroécologique en limons profonds avec cultures industrielles (tableau 3).
Tableau 3 : Enseignements des 5 premières années d’expérimentation du système innovant.

Pour aller plus loin
- Synthèse des résultats de la campagne 2021-2022 et évolution pluriannuelle
- Article « Cultures industrielles : réduire l’usage des intrants en maintenant les marges »
- Article « Plateformes expérimentales Syppre : la transition reste coûteuse »
Les derniers résultats issus de la plateforme picarde ont été présentés lors d’un webinaire le 6 février 2023. Pour consulter le replay, cliquez ici.