La plateforme d’expérimentation Syppre Picardie tire un bilan positif de la campagne précédente, avec notamment un test de colzas sans insecticide.
La plateforme d’expérimentation cultive, sur un bel espace de 10 hectares, huit espèces. Objectif ? Valoriser le potentiel avec moins d’azote et sur un sol fertile, avec au minimum une double rotation (soit 18 ans) sur la station expérimentale d’Estrées-Mons.
En dépit d’un manque de résultats factuels pour le moment, un bilan environnemental positif permet de capitaliser sur des petites victoires qui aident à promouvoir le projet et à réorienter nos techniques.
Des colzas zéro insecticide
Mener une campagne de colza sans insecticide est possible, tout en étant risqué. Le pari a été tenu pendant quatre campagnes consécutives grâce à plusieurs leviers techniques :
-Tout d’abord, le colza est placé stratégiquement derrière une culture légumière (pois de conserve jusqu’en 2020) pour bénéficier de reliquats souvent très importants. Cette stratégie a été choisie après des résultats du projet PCB (Pois-Colza-Blé) entre 2008 et 2011 qui démontrent une meilleure valorisation du précédent par le colza.
–Le travail du sol est limité et les passages sont réalisés au minimum deux semaines avant le semis afin de limiter le dessèchement du sol.
-Enfin, lors du semis, lui aussi précoce, le strip-till est utilisé pour fissurer et remonter de la fraîcheur afin de faciliter les levées et avoir un colza robuste pour le reste de la campagne. L’objectif souhaité est, là, d’atteindre le stade B2 avant début septembre.
Le choix du zéro insecticide est le résultat des observations et des règles de décision choisies. Si l’objectif de rendement de 45 quintaux/ha n’a jamais été atteint, les résultats économiques sur les modalités colza sont parmi les meilleurs de la plateforme.
Un environnement naturel exploité
L’année 2020 a été marquée par une forte pression des ravageurs dans la région, particulièrement sur betterave, et dans une moindre mesure , sur pommes de terre. Sur la plateforme, les impacts ont été minimisés et une pression plus faible a été observé, ce qui peut s’expliquer par l’environnement naturel de la plateforme (beaucoup de cultures, de bandes enherbés…). Pour favoriser et mettre en valeur notre écosystème, un partenariat a vu le jour entre la plateforme et Terres des abeilles de Ternoveo© pour implanter trois ruches d’abeilles domestiques sur la parcelle. En 2021, il a été prévu d’aménager des bandes fleuries pour le bon fonctionnement des ruches, l’arrêt des fauchages des bordures de la parcelle ainsi qu’un pilotage technique encore plus respectueux pour notre faune sauvage.
Campagne 2021 : des obstacles initiaux levés
A l’image de l’année 2020, l’implantation des cultures a posé quelques difficultés. Malgré une problématique chardon qui s’accentue sur les parcelles, le semis du colza a respecté les règles de décision (RDD). Mais différents facteurs ont entraîné une levée très hétérogène, un dépérissement des plantules et un blocage du développement de la culture. Ces difficultés s’expliquent probablement par un souci de rémanence phytosanitaire dû au précédent. Il a donc été décidé de ressemer au plus vite après un double passage d’outils.
Cette réactivité a payé. Aujourd’hui, le colza se porte très bien, avec un état sanitaire irréprochable et zéro larves d’altise lors des berlèses (malgré une forte pression sur cette zone).
En dépit d’une déviation des choix préétablie en amont, les résultats de la récolte 2021 pourront solidifier nos RDD à l’avenir en cas de difficulté d’implantation précoce.
Une méthode innovante testée : l’implantation de pommes de terre
L’une des particularités de la plateforme picarde est la présence de cultures industrielles à forte valeur ajoutée : la betterave et la pomme de terre. Faire cohabiter une réduction du travail du sol avec une culture de pommes de terre est un enjeu important et ambitieux de la plateforme.
En 2019, il a été choisi de mettre en place une technique novatrice qui consiste à effectuer l’ensemble des préparations de sol au début de l’automne. L’objectif : permettre, le froid de l’hiver combiné aux couverts d’intercultures, un travail du sol, ce qui évite un labour et un passage de fraise rotative, outils particulièrement énergivores et affinant excessivement le sol. Le premier résultat est encourageant : un beau couvert durant l’hiver et une structure de sol à l’intérieur des buttes vraiment intéressante. Mais l’implantation des couverts sur des buttes n’était pas aisée. Il a été décidé de semer avant le buttage, technique peu communes. Les résultats de développement du couvert sont satisfaisants.
La reprise au printemps pour l’implantation a été plus difficile et un travail du sol a dû être réalisé, à cause d’une prise en masse du sol en hiver. Néanmoins, un labour et un passage de fraise ont été évités.
Les résultats de la campagne ne sont pas très bons et montrent une disparité entre la modalité classique et innovante. Pour 2021, des pistes ont été identifiées pour améliorer l’implantation au printemps tout en changeant quelques RDD comme la variété, la destruction du couvert ou le matériel.
Les adaptations pour la campagne 2021
Le changement majeur est le remplacement du pois de conserve par un flageolet pour améliorer la rotation de manière à la rendre plus robuste face aux ravageurs et au climat séchant récurrent de ces dernières années. Moins appétant vis-à-vis des corvidés et surtout des ramiers, le flageolet permet également de semer plus tardivement qu’un pois de conserve. Un atout non négligeable lorsque le précédent est un maïs grain laissant beaucoup de résidus. Autre avantage espéré : la stabilité économique (gagner moins mais sécuriser une récolte), surtout sans irrigation.