Les rencontres du Comifer Gemas des 21 et 22 novembre derniers ont permis de présenter les résultats en matière de réduction de la dépendance à l’azote minéral dans les systèmes expérimentés sur les plateformes Syppre.
Réduire le recours aux engrais azotés de synthèse est l’un des objectifs fondateurs des systèmes innovants Syppre. Il a été intégré dès le début lors de la co-conception des systèmes innovants avec les acteurs de terrain. L’objectif est de réduire de 20% l’usage d’azote minéral en comparaison avec le système témoin, optimisé et conduit selon les conseils des instituts techniques.
Combiner des leviers agronomiques et techniques
L’hypothèse de départ est qu’il est possible d’y arriver en combinant plusieurs leviers agronomiques et techniques, et sans dégrader la multiperformance. Ils sont détaillés ci-après :
- L’introduction de légumineuses en culture principale, en couvert et en association, dans une proportion importante : entre 20 et 50% en culture principale, entre 60 et 80% en couvert.
- L’introduction de cultures de diversification, avec des besoins azotés moins élevés que les cultures historiques
- Le positionnement stratégique des cultures dans la rotation pour valoriser au mieux les reliquats azotés laissés par le précédent
- Les apports de produits résiduaires organiques quand ils sont disponibles à proximité
- Le pilotage de l’azote en cours de campagne grâce à l’outil d’aide à la décision (OAD) CHN-conduite
Des pratiques pour améliorer le fonctionnement du sol et le bilan carbone
Ces leviers concourent aussi à préserver le capital sol des parcelles des systèmes innovants. En effet, la biomasse des couverts d’interculture ainsi que les résidus de cultures sont intégrés au sol pour alimenter sa faune. En plus des restitutions de biomasse, le travail du sol profond est limité autant que possible, pouvoir notamment gérer les adventices dans un contexte sans glyphosate. L’hypothèse est que ces pratiques améliorent le fonctionnement du sol ainsi que le bilan carbone. L’objectif de réduire de 20 % le recours à l’azote minéral à l’échelle de la rotation est atteint sur toutes les plateformes (figure 1). La situation en Picardie est légèrement différente car le système innovant utilise des produits résiduaires organiques (PRO) : si on ne réduit pas de 20 % la quantité totale d’azote utilisée, on réduit bien de 20% la quantité d’azote minéral dans ce système.
Trois principales raisons qui expliquent la réduction de l’azote minéral apporté
Les niveaux de réduction s’expliquent principalement par la dilution des cultures consommatrices d’azote et l’augmentation de la part des légumineuses à l’échelle de la rotation. S’y ajoute la diminution plus ou moins forte des apports d’azote à la culture. Ces derniers sont calculés avec la méthode du bilan qui tient compte du précédent, des restitutions de l’éventuel couvert et des reliquats sortie hiver mesurés chaque année sur toutes les parcelles. Les doses d’azote, respectant les besoins des cultures, sont adaptées en conséquence. Le pilotage dynamique en cours de campagne avec CHN permet en plus de cela d’adapter les apports azotés en fonction du potentiel de rendement en cours de campagne. Et ainsi de coller au plus près des besoins de la culture et des possibilités de valorisation des apports.
Réduire l’azote minéral améliore le bilan carbone
La réduction notable des apports d’engrais minéraux joue beaucoup sur celle des émissions de GES, contribuant de ce fait à améliorer le bilan carbone des systèmes innovants. Ces réductions ont lieu aussi bien au champ (émissions directes de N2O et indirectes de N2O via la lixiviation et la volatilisation) qu’en amont, la fabrication d’engrais minéraux étant très consommatrice d’énergie. On note sur la figure 2 que le bilan carbone des systèmes innovants Syppre est positif pour tous les sites. Le nombre de crédits carbone (CC) générés varie entre 0.2 et 2.4 CC/ ha/an, selon que le système innovant déstocke ou stocke du carbone dans le sol. En effet, certains systèmes innovants (Berry, Champagne), peuvent accentuer les dynamiques de déstockage du fait de la réduction de cultures apporteuses de résidus à l’échelle de la rotation. C’est notamment le cas du colza, présent 1 année sur 9 dans le système innovant du Berry, alors qu’il est cultivé 1 année sur 3 dans le témoin. La figure 2 témoigne toutefois que les efforts faits sur la fertilisation compensent le déstockage de carbone.
Les données réelles de rendements des cultures, des couverts, des stocks initiaux de carbone et des doses d’azote apportées ont été considérés dans les calculs. Les bilans présentés en figure 2 illustrent donc avec réalisme les effets des leviers mobilisés dans les systèmes innovants Syppre sur les 5 premières années d’expérimentation. Pour plus de détails, cliquez ici.